Ramadan 2016: troisième semaine

La douceur de Dieu fait naître en
nous le plaisir de travailler
pour la vie à venir

Ramadan 2016: troisième semaine

di Renzo Petraglio

La sourate sur laquelle je veux réfléchir pendant cette troisième semaine est la sourate 42. Le titre de cette sourate est « ash-Shûrâ », c’est-à-dire « la concertation ». Et le titre fait référence à une phrase de la même sourate, là où le Coran présente les vrais croyants en ces termes : « ceux qui croient et placent leur confiance en leur Seigneur, ceux qui évitent les péchés graves et les turpitudes, et pardonnent quand ils sont irrités, qui répondent à l’appel de leur Seigneur, accomplissent la prière, se concertent sur leurs affaires et dépensent en œuvres charitables de ce que nous leur avons attribués » (vv. 36-38). Cette phrase a une dimension religieuse et éthique, mais elle a aussi une dimension politique. D’après cette phrase, « le chef de la communauté ou d’un pays musulman doit détenir son pouvoir, non par hérédité dynastique mais par la volonté populaire (…), comme les premiers califes reconnus à la suite d’une délibération, d’une concertation islamique ». Cette dimension politique est un des éléments de cette sourate. Mais la sourate insiste surtout sur la vraie religion – révélée par Dieu – et sur les choix que nous devons faire et sur les conséquences de nos choix.

17 C’est Dieu qui a révélé le Livre et la balance en toute vérité.

Qu’en sais-tu ? l’Heure (du jugement) est peut-être proche.

18 Ceux qui n’y croient pas sont impatients de la voir venir,

mais les croyants en sont préoccupés, sachant qu’elle est la vérité.

Ceux qui doutent de l’Heure sont dans un égarement lointain.

19 Dieu est plein de douceur envers ses serviteurs. Il donne à qui il veut.

Il est le Fort et le Tout-Puissant.

20 Quiconque désire labourer le champ de la vie à venir, nous ferons prospérer pour lui son labour.

Quiconque désire labourer uniquement le champ de la vie présente, nous lui en donnerons,

mais il n’aura aucune part dans la (vie) à venir (Sourate 42,17-20).

  Les premiers mots de cette page nous parlent de la révélation : Dieu nous a révélé « le Livre et la balance ». Le premier des deux termes évoque la Bible et le Coran. Et, sur le même plan, le Coran met aussi la balance, « al-mîzâna » en arabe, une image concrète pour parler de la justice. Donc : le message central de Dieu, à travers la Bible et le Coran, c’est la justice. Et ce thème de la justice permet aussi de comprendre pourquoi notre page mentionne aussi l’Heure, l’heure du jugement. Donc, la justice est la préoccupation fondamentale du croyant vis-à-vis de la réalité présente et aussi vis-à-vis de « l’Heure » à venir (« as-sâ‘a » en arabe), la fin de l’histoire humaine, l’Heure du jugement. Par rapport à cette Heure, « les croyants en sont préoccupés », mais ils sont quand même confiants, car Dieu est « latîfoun », c’est-à-dire « plein de douceur » envers ses serviteur (v. 19). En effet, Dieu prend soin du travail des croyants en vue de la vie future. Ce travail, le Coran l’exprime en utilisant un verbe qui signifie labourer, cultiver, jeter la semence, œuvrer. « Quiconque désire labourer le champ de la vie future, nous ferons prospérer pour lui son labour » (v. 20). Voilà le labour, le travail, l’engagement que Dieu, un Dieu plein de douceur, nous propose. Et si nous voulons suivre cette proposition, nous pouvons faire l’expérience qu’un poète nous raconte dans le psaume 119. De ce poème, le plus long de tout le psautier, je veux lire avec toi quatre versets d’une strophe. En s’adressant à Dieu, le poète avoue :

101 Je retiens mes pieds loin de toutes les routes du mal, afin de prendre soin de ta parole.

102 Je ne m’écarte pas de tes règles car c’est toi qui me les enseignes.

103 Que tes instructions sont douces à ma bouche, plus que le miel sur ma langue !

104 Grâce à tes directives j’ai du discernement,

c’est pourquoi je déteste toutes les routes du mensonge (Psaume 119,101-104).

  Le message que ce poète nous donne est très clair : le Seigneur nous instruit à travers ses instructions, ses directives. Mais les directives de Dieu ne sont pas des impositions que nous avons de la peur à transgresser. Les instructions de Dieu, un Dieu plein de douceur, « sont douces à ma bouche, plus que le miel sur ma langue » (v. 103). Et le poète, une personne qui « déteste toutes les routes du mensonge » (v. 104), évite « toutes les routes du mal afin de prendre soin » de la parole de Dieu (v. 101). Ces quelques versets font naître en nous le plaisir et le désir – pour le dire avec les mots du Coran – « de labourer le champ de la vie future ». Et, en nous laissant conduire pas ce désir, nous pourrons constater que Dieu est à côté de nous, pour faire prospérer, pour nous, notre labour.


Le Coran. Traduction française et commentaire, par Si Hamza Boubakeur, Maisonneuve & Larose, Paris. 1995, p. 1503.
L’expression « le Livre et la balance », on la retrouve aussi dans la sourate 57,25.
Cf. le volume, fruit d’une recherche islamo-chrétienne, Bibbia e Corano: cristiani e musulmani di fronte alle scritture, Cittadella, Assisi, 1992, p. 23ss.
Cf. Dictionnaire du Coran, sous la direction de M. A. Amir-Moezzi, Laffont, Paris, 2007, p.388s.
Cf. M. Gloton, Une approche du Coran par la grammaire et le lexique. 2500 versets traduits – lexique coranique complet, Albouraq,  Beyrouth, 2002, p. 326, nr. 0306.

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