Pasqua 2014

«Vous avez été réveillés de la mort
avec le Christ» (Col 3,1)

Pâques : 20 avril 2014

Première lecture

La lettre aux Colossiens, écrite par Paul ou, plus probablement, par un de ses collaborateurs1, date peut-être des années 61-63. Par rapport aux lettres antérieures de Paul, ici l’auteur souligne le changement profond qui s’accomplit au moment du baptême : « ensevelis avec le Christ dans le baptême, vous avez été réveillés en lui, parce que vous avez cru en la force de Dieu qui l’a réveillé des morts. Et vous, qui étiez morts à cause de vos fautes, Dieu vous a fait revivre avec lui ! Il nous a pardonné toutes nos fautes » (2,12-13).

Cette conception du baptême comme participation – dès maintenant ! – à la condition du Christ réveillé des morts retentit aussi dans la partie finale de la lettre.

De cette partie nous allons écouter deux petites sections.

Dans la première (vv. 1-4), l’auteur rappelle une nouvelle fois à ses destinataires : « vous avez été réveillés de la mort avec le Christ ». Et il en tire immédiatement les conséquences : « recherchez les choses d’en haut, là où est le Christ » et « songez aux choses d’en haut, non à celles de la terre » (v. 1-2). Ces deux impératifs ne suggèrent aucune fuite loin des réalités du monde2. Ils demandent une prise de distance par rapport à la vie que les chrétiens vivaient avant de devenir croyant. A cette vie-là, ils sont désormais morts. Et ils vivent, maintenant, une vie nouvelle : « le Christ est votre vie ». En effet, le Christ ressuscité les anime en tout, aux niveaux ecclésial, social et éthique3.

Dans une deuxième section de notre lettre (vv. 5-11) qu’on ne lira pas ce matin, l’auteur indique à quoi les chrétiens sont morts : à une conduite sexuelle immorale, au désir de s’approprier des biens des autres, à toutes formes de sorcellerie et au culte des fausses divinités, à la colère, aux injures et au mensonge. Voilà les choses de la terre et les comportements auxquels les chrétiens sont morts.

Enfin, dans la section suivante (vv. 12-17) que nous allons lire en terminant, notre auteur va indiquer quel est – et quel doit être – le comportement des chrétiens. Ces femmes et ces hommes qui, avec le Christ, ont été réveillé(e)s de la mort, doivent désormais avoir des entrailles de tendresse envers les autres, de la douceur, de la patience, de la tolérance, capables de pardonner et de s’engager dans l’amour. Car l’amour « est le lien parfait » (3,14) et Dieu est celui qui « vous aime » (v. 12).

De la lettre aux Colossiens (3,1-4.12-17)

1 Si donc vous avez été réveillés de la mort avec le Christ, recherchez les choses d’en haut, là où est le Christ, assis à la droite de Dieu. 2 Songez aux choses d’en haut, non à celles de la terre.

3 Car vous êtes morts, et votre vie a été cachée – et reste cachée – avec le Christ en Dieu. 4 Le Christ est votre vie. Quand il sera manifesté, vous aussi, vous serez manifestés avec lui et vous participerez à sa gloire.

12 Dieu vous a choisis, il veut que vous soyez à lui et il vous aime. Ayez, donc, des entrailles de tendresse et de bonté, un cœur simple, doux, patient. 13 Acceptez-vous les uns les autres et pardonnez-vous si quelqu’un a un reproche à faire à un autre. Le Seigneur vous a pardonné, agissez comme lui ! 14 Et par-dessus tout, mettez l’amour, qui est le lien parfait. 15 Que la paix du Christ dirige vos cœurs ! Dieu vous a appelés à cette paix pour former un seul corps. Dites-lui toujours merci.

16 Que la parole du Christ habite en vous avec toute sa richesse. Donnez-vous des enseignements et des conseils avec toute la sagesse possible. Remerciez Dieu de tout votre cœur, en chantant des psaumes, des hymnes et des cantiques qui viennent de l’Esprit Saint. 17 Tout ce que vous pouvez dire ou faire, faites-le au nom du Seigneur Jésus, en remerciant par lui Dieu le Père.

Psaume

Le psaume 142 est la supplication – une supplication pleine d’espoir – d’un homme persécuté.

Le premier verset nous présente le psaume comme un enseignement, un enseignement de David. Et le poète pense à David qui, poursuivi et menacé par Saül, s’était réfugié dans une caverne (1 Sam 24,3-4)4.

Après cette introduction, la première strophe (vv. 2-5) décrit la lamentation du poète et aussi la situation dans laquelle il se trouve. La lamentation (vv. 2-3) est un cri « à pleine voix », c’est une supplication dans laquelle le poète expose son angoisse. Dans les versets suivants (vv. 4-5), le motif de cette angoisse devient clair. Le poète est découragé, à bout de souffle. Des ennemis lui ont tendu un piège. S’il regarde à droite, le côté favorable d’où viennent l’aide et le secours5, il ne voit personne. Personne n’a de souci pour lui. Voilà comment le poète raconte à Dieu sa situation.

Dans la strophe centrale (v. 6), le poète avoue à Dieu sa confiance, totale : « C’est toi mon abri, ma part sur la terre des vivants ». Si chaque personne a droit à une part, à une parcelle de terre (Am 7,4 ; Os 5,7), le poète dit à Dieu : tu es ma part, tu es ma parcelle (de terre) sur la terre des vivants. Dieu reste le seul bien pour le poète, le seul espace de vie. « Le Seigneur reste désormais – comme disait Jean Paul II en commentant ce psaume – le dernier et l’unique fondement sur lequel se baser, la seule possibilité de vie, l’espérance suprême »6.

Dans la troisième strophe (vv. 7-8), le poète renouvelle sa prière. Il est faible, intensément, tandis que ses persécuteurs sont puissants. Il est faible et sans avenir. Il est comme dans une « prison », nous dit-il en utilisant ce mot qui revient seulement ici dans tout le psautier. Voilà pourquoi il prie : « Fais-moi sortir de prison ». Et cette libération lui permettra de célébrer le nom du Seigneur. Et il y aura une fête : « autour de moi les justes feront cercle ». Les justes feront cercle autour de lui car ils considéreront le salut de leur frère comme un don qui leur a également été fait.

Vers la fin de son commentaire, Jean Paul II disait : « La tradition chrétienne a appliqué le Psaume au Christ persécuté et souffrant. Dans cette perspective, l’objectif lumineux de la supplication du Psaume se transfigure en un signe pascal, sur la base de l’issue glorieuse de la vie du Christ et de notre destin de résurrection avec lui »7.

1 Cf. A. Dettwiler, Epître aux Colossiens, dans
Le Nouveau Testament commenté, sous la direction de

C. Focant et D. Marguerat, Bayard – Labor et fides,
Paris – Genève 2012, p. 892.

2Cf. J.-N. Aletti, Saint Paul : Epitre aux Colossiens, Gabalda,
Paris 1993, p. 218
.

3Cf. ibidem, p. 221.

4 Pour la structure et le commentaire du psaume,
cf. F.-L. Hossfeld dans F.-L. Hossfeld – E. Zenger,

Psalmen 101-150, Herder
, Freiburg – Basel – Wien 2008, p. 753ss.

5 Cf. J.-L. Vesco, Le psautier de David traduit et commenté,
Cerf, Paris 2006, p. 1320.

6 Audience générale de Jean-Paul II, mercredi 12 novembre 2003.