Carême 2015 : Deuxième semaine

Dieu prend soin de nous et il nous pousse à prendre soin des autres

Carême 2015 : Deuxième semaine

 

Pendant cette deuxième semaine de carême, je veux revenir à Jérémie et, en particulier au « Livre de la consolation ». C’est ainsi qu’on appelle les chapitres 30 et 31 de ce prophète.

En effet, ces deux chapitres sont pleins d’espoir. Vers les années 590 avant la naissance de Jésus1, à celles et ceux qui ont été exilé(e)s, Jérémie annonce un changement radical : un réconfort inattendu2. C’est Dieu lui-même qui va l’accomplir. Et ce changement, Jérémie l’exprime à travers six poèmes. Pour ma part, je m’arrête un moment sur la deuxième partie du cinquième :

10 Vous, les peuples, écoutez la parole de Yhwh:

annoncez-la dans les îles lointaines.

Dites : « Celui qui a dispersé Israël le rassemblera

et il prendra soin de lui comme un berger prend soin de son troupeau ».

11 Car Yhwh libère les gens de Jacob,

il les revendique, les délivrant de la main d’un ennemi plus fort qu’eux.

12 Et ils viendront et pousseront des cris de joie sur la hauteur de Sion ;

ils s’en iront vers le bien de Yhwh, vers le blé et vers le vin et vers l’huile fraîche,

et vers des moutons, des chèvres et des bœufs.

Et ils se sentiront revivre comme un jardin arrosé,

et ils ne risqueront plus de perdre leurs forces.

13 Alors la jeune fille se réjouira dans la danse,

jeunes gens et vieillards se réjouiront ensemble.

Et je changerai leur deuil en joie et je les consolerai, je les réjouirai après leurs souffrances.

14 Je donnerai aux prêtres beaucoup de viande grasse

et mon peuple sera comblé de mon bien.

Voilà ce que Yhwh déclare (Jérémie 31,10-14).

Les destinataires de ce message d’espoir sont des personnes que Dieu va libérer de la main des puissants (v. 11). C’est à travers cette intervention que Dieu apparaît comme un berger, le berger qui « prend soin de son troupeau » (v. 10). Quant aux derniers versets, ils évoquent la joie. Cette joie est la réaction la plus spontanée qui peut naître dans le cœur d’une personne libérée de la main des puissants. Mais cette joie n’est pas seulement la joie des humains : la jeune fille, les jeunes gens et les vieillards. Cette joie est, elle aussi, œuvre de Dieu, Dieu qui dit : « je changerai leur deuil en joie » (v. 13). Après l’intervention de Dieu qui libère les opprimés, il y a donc une co-opération : Dieu et les humains ensemble.

Cette page biblique me rappelle aussi la sourate 93 du Coran. Elle évoque l’intervention de Dieu dans la vie de Muhammad :

1 Par la clarté du matin 2 et par la nuit quand elle étend ses voiles !

3 En vérité, ton Seigneur ne t’a ni abandonné ni détesté !

4 Certes, la vie future te réserve plus de joies que la vie présente,

5 et ton Seigneur te comblera bientôt de bienfaits dont tu seras satisfait.

6 Ne t’a-t-il pas trouvé orphelin quand il t’a recueilli ?

7 Ne t’a-t-il pas trouvé égaré quand il t’a guidé ?

8 Ne t’a-t-il pas trouvé démuni quand il t’a enrichi ?

9 Alors, quant à l’orphelin, ne lui fais pas violence !

10 Quant à l’homme qui est dans le besoin, ne le repousse jamais !

11 Quant aux bienfaits de ton Seigneur,

n’oublie jamais de les proclamer ! (Sourate 93 : Ad-Duhâ, La clarté du matin).

Dieu est intervenu dans la vie de Muhammad orphelin, égaré, démuni, et il a pris soin de lui. Et maintenant le prophète – un peu comme dans la page de Jérémie – doit proclamer les bienfaits que Dieu a accomplis. Mais cette proclamation n’est pas une série de mots vides. Le changement mis en œuvre par Dieu doit faire naître un engagement de la part des humains. « Alors, quant à l’orphelin, ne lui fais pas violence ! Quant à l’homme qui est dans le besoin, ne le repousse jamais ! » (vv. 9-10). Bref, Dieu intervient et change notre tristesse en joie. Et nous, en nous réjouissant, nous nous engageons pour partager la tristesse des autres et pour leur faire partager notre joie3.


1 Cfr. G. Fischer, Jeremia 26-52, Herder, Freiburg – Basel – Wien 2005, p. 120.

2 Cfr. G. Fischer, Il libro di Geremia, Città Nuova, Roma 1995, p. 143.

3 Une femme, en commentant cette page du Coran, écrit : « Les croyants ne sauraient se lasser de communiquer leur joie, de faire partager leur expérience nouvelle de la Grandeur et de la Générosité du Dieu Unique, et leur conscience de la dignité humaine » (Meriam-Herzog Tourki, Paroles du Coran pour aujourd’hui, Mediacom, Amiens 1998, p. 196).

 

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