Carême 2019 : première semaine

Dieu est notre « Père », notre « Papa »

Carême 2019 : première semaine

Le carême est un temps de réflexion, un temps pour retourner à Dieu. Et, en vue de ce retour à Dieu, je veux me laisser guider par la prière du Notre Père. Cette prière, nous la connaissons surtout grâce à l’Évangile selon Matthieu, plus précisément à Matthieu 6,9-13. Mais, pendant cette année 2019, la liturgie nous propose surtout l’Évangile de Luc. Voilà pourquoi, dans cette période de carême, je vais lire avec toi, mon ami, ma chère, la prière du Notre Père dans la version que Luc nous a transmise.
Dans l’Évangile selon Luc, le chapitre 11 s’ouvre avec ces deux versets :

1 Et il advint pendant que (Jésus) était en un certain lieu en priant.
Quand il eut fini, un de ses disciples lui dit :
« Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean aussi l’a appris à ses disciples ».
2 Il leur dit : « Quand vous priez, dites :
Père,
que ton nom soit sanctifié ;
que ton règne vienne ! (Luc 11,1-2).

Ici, on voit très clairement que la première partie de notre prière est structurée en trois moment. Le premier est une seule parole : « Père », en grec « Pa ́ter ». Dans l’Ancien Testament, seulement rarement le mot « Père » est appliqué à Dieu . Mais dans la prière et dans l’enseignement de Jésus, l’image de Dieu comme « Père » est très fréquente.
Dans Luc 11,2, derrière le mot « Père » il faut lire l’araméen « Abba » , c’est-à-dire « Papa ». Oui, car ce mot araméen est l’expression pleine de tendresse qu’une personne, depuis son enfance, utilise, en araméen, pour s’adresser à son papa. Et Jésus, lorsqu’il nous apprend à nous adresser à Dieu, il nous invite à utiliser ce mot qui – en toute simplicité – évoque une relation très intime et un abandon total .
Ce mot était utilisé par Jésus lui-même. Il suffit de se rappeler que, à la veille de sa mort, Jésus – au Gethsémani – s’est adressé à Dieu en lui disant : « Abba, Père, à toi tout est possible ; éloigne de moi cette coupe. Toutefois non pas ce que moi, je veux, mais ce que, toi, tu veux » (Mc 14,36). Et le même mot araméen on le retrouve deux fois aussi chez Paul ,

lorsque l’apôtre mentionne la prière que les chrétiens – de langue grecque – utilisent pour s’adresser à Dieu .
La personne qui s’adresse à Dieu en l’appelant « Père », « Abba », « Papa », s’abandonne totalement à sa tendresse. Cela apparaît très clairement dans ce que Paul écrit aux chrétiens de Corinthe : « Béni (soit) le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de tout encouragement » (2 Cor 1,3). Et ici, avec le pluriel « miséricordes », en grec « oiktirmoi », un écrivain comme Paul ne pouvait que penser à l’hébreu « rahamîm », c’est-à-dire les « entrailles maternelles » de Dieu .

Et en pensant à l’invocation « Père », « Abba », « Papa » et à ses « entrailles maternelles », ma pensée court aussi au Coran, et plus précisément à la « Basmala » , le verset qui ouvre la première sourate du Coran, et toutes les autres sourates sauf une :
Au nom de Dieu, le tout miséricordieux, le très miséricordieux (Sourate 1,1) .

Le Coran s’ouvre donc dans le signe du « nom de Dieu ». Dans la langue originale du Coran, derrière le mot « Dieu », nous avons « Allah », un terme unique au niveau de la grammaire, un terme qui n’est ni masculin ni féminin, et ça en accord avec la conception islamique de Dieu . Et ce terme « Allah », qui correspond à l’hébreu « El » ou « Elohim », est le point de rencontre fondamental pour tous les croyants : nous tous, juifs, musulmans et chrétiens, nous adorons « El/Allah/Dieu ».
Toujours dans la même phrase du Coran, Dieu nous est présenté avec deux attributs : « le tout miséricordieux, le très miséricordieux ». En arabe, ces deux termes sont très proches l’un de l’autre : « Ar-Rahmân » et « Ar-Rahîm » . Les deux font référence aux entrailles maternelles, à la matrice comme on disait à l’époque, c’est-à-dire à l’utérus. Dieu nous est ainsi présenté sous le signe de l’amour maternel, de la protection, de la miséricorde.
Pour conclure cette page : le Notre Père et la première phrase du Coran nous invitent à mettre toute notre confiance en Dieu, Dieu dans son amour et sa tendresse de papa et de maman en même temps. Pour le dire avec les mots d’une femme : à travers l’image du ventre maternel de Dieu, laissons nous prendre par sa tendresse prévenante, sa sollicitude bienveillante et vivifiante qui seule peut nous redonner confiance et espoir.

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