Ramadan 2022

 

La résurrection de Jésus

Dans ces jours de Pâques, je veux lire une section de l’Évangile selon Luc. C’est le chapître 24, là où Jésus, rendant visite à ses disciples le jour de Pâques, leur donne son dernier message[1] :

44 Jésus leur dit: «Celles-ci sont mes paroles, celles que moi je vous ai dites quand j’étais encore avec vous: il faut que s’accomplissent toutes les choses qui, à propos de moi, ont été écrites – écritures définitives – dans la Loi de Moïse et dans les Prophètes et dans les Psaumes». 45 Alors il leur ouvrit l’intelligence pour comprendre les Écritures. 46 Et il leur dit: «Ainsi il est écrit, écriture définitive: Le Christ souffrira et, le troisième jour, se relèvera d’entre les morts, 47 et la conversion, qui conduit au pardon des péchés, sera proclamée – en son nom – toutes les nations, commençant à partir de Jérusalem. 48 C’est vous qui serez témoins de ces choses » (Luc 24,44-48).

Le verset 44 rappelle ce qu’on lit dans le début de ce même chapître, la narration des femmes qui, le matin de Pâques, étaient allées à la tombe pour porter des aromates au corps de Jésus[2]. A ces femmes qui ne trouvent pas le corps de Jésus, «deux hommes en vêtement éclatant» (24,4), donc deux messagers venant du ciel, annoncent la résurrection de Jésus en leur disant: «Pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts? Il n’est pas ici, mais il est ressuscité. Souvenez-vous de ce qu’il vous a dit quand il était encore là en Galilée. Il disait que le Fils de l’homme devait être livré entre les mains d’hommes pécheurs, être crucifié et ressusciter le troisième jour» (24,5-7).

Par rapport à ces versets, dans le verset 44, Jésus ajoute la référence à l’Ancien Testament: «Il faut que s’accomplissent toutes les choses qui, à propos de moi, ont été écrites dans la Torah de Moïse et dans les Prophètes et dans les Psaumes». Et ici, chose surprenante, l’Écriture n’est pas évoquée seulement comme «la Torah» et «les Prophètes» comme habituellement dans les Évangiles, mais comme composée de trois parties: la Loi, les Prophètes et les Psaumes. Cette façon de mentionner l’Ancien Testament a un parallèle dans la tradition juive attestée dans un manuscrit de Qumrân et jouera un rôle important dans les Actes des apôtres[3]. En effet, dans les Actes, les Psaumes sont utilisés pour préparer la foi dans la résurrection (cf. Actes 13,33).

Enfin, dans les versets 46-47, Jésus renvoie encore à l’Écriture en utilisant trois verbes[4]: «Le Christ souffrira et, le troisième jour, se relèvera d’entre les morts, et la conversion, qui conduit au pardon des péchés, sera proclamée – en son nom – à toutes les nations». Et, dans cette phrase l’Écriture évoque, avec la passion et la résurrection, l’activité de la communauté dans sa prédication de conversion et l’offre du pardon[5].

A côté de cette page de l’Évangile, je vœux lire aussi des versets du Coran, plus précisément des versets de la Sourate titrée «Marie», une Sourate de laquelle, il v a deux semaines, nous avons lu une petite section. Voici les versets que nous avons déjà lus et aussi les suivants:

30 Il dit: «Je suis le serviteur de Dieu. Il m’a donné le livre et m’a fait prophète. 31 Où que je sois, il m’a fait béni. Il m’a enjoint, tant que je reste vivant, la prière et l’ [aumône] épuratrice 32 et la bonté envers ma mère. Il ne m’a fait ni despote ni misérable. 33 Paix sur moi le jour où je fus enfanté, le jour où je mourrai, et le jour où je serai ressuscité vivant». 34 Voilà Jésus, fils de Marie: parole de vérité, dont ils doutent (Sourate 19,30-34)[6].

Dans ces versets, le Coran nous présente les premiers mots de Jésus, Jésus qui – encore dans son berceau (v. 29) – se présente dans sa relation avec Dieu. Il déclare: «Je suis le serviteur de Dieu». Quant à Dieu: «Il m’a donné le livre et m’a fait prophète ». Et, en soulignant sa relation personnelle avec Dieu, Jésus permet aux gens de comprendre le caractère unique de sa naissance, une naissance miraculeuse.

Ensuite, dans les versets 31 et 32, Jésus présente quel sera son style de vie, le style d’un homme «béni», un homme qui prie, qui vis sa solidarité avec les pauvres et les marginalisés et, en même temps, la bonté avec sa mère.

Ensuite, dans le verset 33, l’enfant Jésus regarde sa vie tout entière – naissance, mort et résurrection – sous le signe de la paix. Ce verset est dans la ligne du verset 15, toujours dans cette sourate, où – à propos de Jean – on lit: «Paix sur lui le jour où il fut enfanté, le jour où il mourra et le jour où il sera ressuscité vivant!». Les deux phrases sont très semblables, mais, si à propos de Jean c’est Dieu qui dit «Paix sur lui», dans le verset 33, c’est Jésus lui-même à dire: «Paix sur moi»[7]. Et la même remarque vaut à propos de la résurrection; à propos du Baptiste, c’est Dieu qui affirme: «il sera ressuscité vivant»; à propos de Jésus, c’est lui-même – dans le Coran comme dans la Bible – qui évoque sa résurrection future. Que ce regard vers l’avenir puisse animer aussi chacune et chacun de nous.

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[1] A Luc 24,36-49, François Bovon donne ce titre : « Présence du Ressuscité et dernier message ». Cf. F. Bovon, L’Évangile selon saint Luc. 19,28-24,53, Labor et fides, Genève, 2009, p. 454.

[2] Pour ce renvoi, cf. C. Marcheselli Casale, Luca 24,36-53, dans Luca. Nuova traduzione ecumenica commentata, a cura di E. Borghi, Edizioni Terra Santa, Milano, 2018, p. 350.

[3] Cf. F. Bovon, L’Évangile selon saint Luc. 19,28-24,53, Labor et fides, Genève, 2009, p. 468.

[4] Cf. E. Borghi, La gioia del perdono. Lettura esegetico-ermeneutica del Vangelo secondo Luca, Edizioni Messaggero, Padova, 2012, p. 399.

[5] D. Marguerat et E. Steffek, Évangile selon Luc, dans Le Nouveau Testament commenté, sous la direction de C. Focant et D. Marguerat, Bayard – Labor et fides, Paris – Genève, 2012, p. 397s.

[6] Pour une traduction presqu’identique à celle-ci, cf. Le Coran. Texte arabe et traduction française, par ordre chronologique selon l’Azhaar, avec renvoi aux variantes, aux abrogations et aux écrits juifs et chrétiens, par S. A. Aldeeb Abu-Sahlieh, L’Aire, Vevey, 2009, p. 124.

[7] Pour cette remarque, cf. M. Gloton, Jésus le Fils de Marie dans le Coran et selon l’enseignement d’Ibn ‘Arabî, Albouraq, Beyrouth, 2006, p. 314s.