Eucharistie : 18 mai 2023

Kath. Pfarrkirche St. Johannes Baptist, Obereschach, Stadt Ravensburg
Fresken von Gebhard Fugel, 1893/1894

 

L’ascension, la montée de Jésus vers le ciel,
n’empêche pas Jésus de rester avec nous

 

Première lecture

Luc, après avoir écrit son Évangile, se met à écrire le livre des Actes. Et ce matin nous allons lire la première page de ce deuxième livre qui raconte l’histoire des premières communautés chrétiennes.

Il y a d’abord un prologue (vv. 1-3). Ici Luc mentionne les personnages fondamentaux :

* d’abord Jésus, ses actions et son enseignement, sa passion et sa résurrection ;

* le Souffle saint, que Jésus a donné ;

* les apôtres, auxquels il s’est « présenté vivant après sa passion » ;

* enfin, sans être directement mentionné, il y a Dieu dans la phrase passive : Jésus « fut enlevé », fut enlevé… par Dieu.

Après le prologue, Luc raconte le « testament » du Ressuscité et son enlèvement.

Dans l’antiquité, on avait l’habitude de raconter les discours d’adieu d’une personne avant sa mort. Et Luc fait de même dans les versets 4-8. Dans un repas avec les apôtres, Jésus, « vivant », insiste sur le don de l’Esprit, le Souffle saint que les prophètes avaient annoncé pour les derniers temps. Ce don sera donné avec une générosité extrême : « c’est dans un Souffle saint que vous serez baptisés » (v. 5). Et le verbe « baptiser » signifie, à la lettre, « immerger profondément ».

Cette immersion totale dans le Souffle saint va permettre de devenir des « témoins de moi » (v. 8) : elle permettra de parler de ce mystère de la Parole qui prend corps en nos histoires par le témoignage rendu à Jésus.

Enfin, dans les derniers versets (vv. 9-11), voici l’enlèvement. Il y a à nouveau le passif : « il fut élevé » par Dieu. Mais Luc parle aussi d’une « nuée ». Et la nuée, dans la Bible, évoque l’intimité avec le Père. C’est une nuée qui va soustraire Jésus aux regards des disciples. Mais la nuée suggère aussi sa présence, comme celle de Dieu qui dit : « Voici, je viens vers toi dans l’épaisseur de la nuée » (Ex 19,9). D’autre part, les deux hommes que Luc mentionne nous l’assurent : Jésus va encore faire route avec les hommes « de la même manière » (v. 11) comme il a fait route vers le ciel.

 

Lecture des Actes des apôtres (1,1-11)

1 Le premier livre, ô Théophile, je l’ai écrit au sujet de tout ce que Jésus avait commencé à faire et à enseigner, depuis le commencement 2 jusqu’au jour où, après avoir donné, dans un Souffle saint, ses instructions aux apôtres qu’il avait choisis, il fut enlevé (au ciel). 3 C’est encore à eux qu’avec de nombreuses preuves il s’était présenté vivant après sa passion ; pendant quarante jours, il s’était fait voir d’eux et leur avait parlé du Royaume de Dieu.

4 Et, partageant le repas avec eux, il leur recommanda de ne pas quitter Jérusalem, mais d’y attendre la promesse du Père, « celle, dit-il, que vous avez entendue de ma bouche : 5 Jean a bien donné le baptême d’eau, mais vous, c’est dans un Souffle saint que vous serez baptisés d’ici quelques jours ».

6 Ils étaient donc réunis et l’avaient interrogé en disant : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le Royaume pour Israël ? » 7 Il leur dit : « Ce n’est pas à vous de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. 8 Mais vous allez recevoir une puissance, celle du Souffle saint qui viendra sur vous ; vous serez alors témoins de moi à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre ».

9 Et ayant dit cela, comme les Apôtres le regardaient, il fut élevé, et une nuée vint le soustraire à leurs regards. 10 Et, comme ils tenaient fixe leur regard alors que lui faisait route vers le ciel, voici que deux hommes en vêtements blancs se trouvèrent à leur côté 11 et leur dirent : « Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui fut enlevé loin de vous vers le ciel viendra de la même manière que vous l’avez vu faisant route vers le ciel ».

Parole du Seigneur.

 

Psaume

Le psaume 47 a été créé vers les années 500-400 avant Jésus Christ.

A Jérusalem il y a aussi des étrangers et, parmi eux, des personnes qui s’ouvrent au Dieu d’Israël. C’est en constatant cela que le poète compose un chant pour célébrer Dieu comme le Dieu d’Israël et de tous les peuples.

L’ouverture à tous les peuples apparaît déjà dans la première strophe. En elle, le poète adresse à tous les habitants de la terre cette invitation : « battez vos mains en applaudissant, poussez l’acclamation pour Dieu ». Voilà comment chaque personne peut réagir, dans la joie, au fait que le Très-Haut est « le roi grand sur toute la terre ».

Dans la deuxième strophe, le poète nous met devant les yeux une image : dans l’acclamation que les humains lui adressent et dans la musique de différents instruments, Dieu monte au temple de Jérusalem. Mais à travers cette image, le psaume évoque le triomphe céleste de Yahvéh reconnu par tous comme roi de toute la terre et des nations[1]. Enfin, en terminant cette strophe, le poète évoque aussi son identité juive : Yahvéh est son Roi et le Roi d’Israël. C’est à ce Roi que le psaume invite tous les peuples à chanter[2] : « chantez pour notre Roi, chantez ! ».

Dans la strophe suivante, le psaume revient – comme au verset 3 – sur Dieu comme le « roi de toute la terre ». A ce Dieu unique, qui règne sur toutes les nations, le poète nous invite à chanter. Mais le chant qu’on lui adresse doit devenir un « poème instructif »[3], donc un poème qui nous pousse à vivre une relation intime avec Dieu.

Et pour nous, ce matin, les paroles de ce psaume sont une invitation à méditer sur l’ascension de Jésus au ciel. D’ici notre refrain à la fin de chaque strophe :

Dieu monte parmi les acclamations,
dans la voix de la corne du bélier. Alléluia.

 

Psaume 47 (versets 2-3. 6-7. 8-9) 

2 Vous, tous les peuples, battez vos mains en applaudissant,

dans vos cris de joie, poussez l’acclamation pour Dieu.

3 Car Yahvéh, le Très-Haut, est digne du plus profond respect,

il est le roi grand sur toute la terre.

Refr. :  Dieu monte parmi les acclamations,

dans la voix de la corne du bélier. Alléluia.

 

6 Dieu monte parmi les acclamations,

Yahvéh dans la voix de la corne du bélier.

7 Chantez pour Dieu, chantez !

chantez pour notre Roi, chantez !

Refr. :  Dieu monte parmi les acclamations,

dans la voix de la corne du bélier. Alléluia.

 

8 Car roi de toute la terre est Dieu.

Chantez un poème instructif !

9 Dieu règne sur les nations ;

Dieu est assis sur son trône saint.

Refr. :  Dieu monte parmi les acclamations,

dans la voix de la corne du bélier. Alléluia.

 

Deuxième lecture

C’est probablement un disciple de Paul celui qui, entre les années 80 et 90 du premier siècle, écrit la lettre aux Éphésiens. Après la mort de Paul, ses communautés, restées pour ainsi dire ‘orphelines’, risquent de se fragmenter en petits cercles. Devant ce risque, l’auteur de notre lettre s’engage pour que la communauté puisse maintenir une ouverture œcuménique[4]. Voilà pourquoi, en parlant de « la richesse magnifique » que Dieu a donnée aux croyants d’Éphèse, l’auteur la présente comme un partage, un don « qu’il vous fait partager[5] avec ceux qui lui appartiennent » (v. 18).

Un autre thème important que l’auteur développe dans la première partie de sa lettre est le dessin de Dieu et sa révélation dans l’histoire[6]. En effet, le projet de Dieu est magnifique et surprenant, et Dieu l’a montré dans le Christ, quand Dieu « l’a ressuscité d’entre les morts et l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux » (v. 20).

Mais, le fait de s’ouvrir au projet de Dieu et à son intervention dans le Seigneur Jésus n’est pas une question d’intelligence. C’est un don de Dieu. Et Dieu seul peut donner cette sagesse. D’ici la prière de l’auteur : « Je demande au Père glorieux, de vous donner un esprit de sagesse … qui vous révèle Dieu » (v. 17). Et nous aussi, après deux millénaires, nous avons besoin de cet esprit de sagesse pour discerner le projet de Dieu dans notre vie.

Et la page de ce matin se termine en chantant ce projet de Dieu, le projet qu’il a mis en œuvre dans le Christ et dans son Église : le Christ que Dieu « a donné comme tête à l’Église » (v. 22), et l’Église qui « est le corps du Christ » (v. 23). Que la lettre aux Éphésiens puisse nous encourager jour après jour, là où l’auteur nous assure : dans l’Église et dans notre communauté « le Christ est totalement présent, lui qui remplit totalement chaque membre de l’Église »[7].

 

De la lettre aux Éphésiens (1,17-23)

Mes chers frères et sœurs, 17 je demande au Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, au Père glorieux, de vous donner un esprit de sagesse : c’est lui qui vous révèle Dieu et vous le fait vraiment connaître.

18 Je lui demande d’ouvrir les yeux de votre intelligence. Ainsi, vous pourrez connaître l’espérance qu’il vous a donnée en vous appelant. Vous connaîtrez la richesse magnifique des biens qu’il vous fait partager avec ceux qui lui appartiennent.

19 Vous connaîtrez la puissance extraordinaire que Dieu a montrée pour nous qui croyons en lui. Son énergie, sa puissance et sa force, 20 Dieu les a mises en œuvre dans le Christ, quand il l’a ressuscité d’entre les morts et l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux. 21 Ainsi, le Christ est placé au-dessus de toutes les forces et de toutes les puissances qui ont autorité et pouvoir. Il est au-dessus de tout ce qui existe, non seulement dans le monde d’aujourd’hui, mais aussi dans le monde à venir. 22 Oui, Dieu a tout mis sous les pieds du Christ. Il a mis le Christ au-dessus de tout, et il l’a donné comme tête à l’Église. 23 Et l’Église est le corps du Christ. En elle, le Christ est totalement présent, lui qui remplit totalement chaque membre de l’Église.

Parole du Seigneur.

 

Alléluia. Alléluia.

Allez ! De toutes les nations faites des disciples, dit le Seigneur.

Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. (Mt 28,19a et 20b)

Alléluia.

 

Évangile

Dans un instant, nous allons lire la dernière page de l’Évangile selon Matthieu. Le narrateur évoque la dernière rencontre de Jésus avec ses disciples. Les disciples se prosternent devant Jésus ressuscité. Mais parmi eux, comme parmi nous, il y a ceux qui ont des doutes. Et pourtant, Jésus leur confie une tâche : être témoins de Jésus et permettre à d’autres de devenir des disciples. Le texte fait aussi mention du baptême, un mot grec qui désigne une immersion totale dans la vie du Père, du Fils et de l’Esprit.

Le baptême dont il est question n’est pas un geste liturgique, c’est le signe d’un engagement : l’engagement à apprendre – jour après jour – « à garder », c’est-à-dire à mettre en pratique tout ce que Jésus nous a enseigné.

La tâche est immense. Mais nous ne sommes pas abandonné(e)s à nos seules forces. L’Emmanuel -ce nom signifie « Dieu avec nous » – nous accompagne, nous soutient, nous encourage. C’est lui-même qui nous l’assure : « voici : moi, je suis avec vous[8] tous les jours jusqu’à la fin des temps » (v. 20). L’ascension, la montée de Jésus vers le ciel, n’empêche pas Jésus de rester avec nous aujourd’hui et jusqu’à la fin des temps. 

 

Lecture de l’Évangile selon Matthieu (28,16-20)

16 Les onze disciples allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre. 17 Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais quelques-uns eurent des doutes. 18 Et Jésus, s’approchant, leur parla en disant : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. 19 Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, 20 leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. Et voici : moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps ».

 

Acclamons la Parole de Dieu.

 

Prière d’ouverture

Le soleil s’est levé du froid tombeau de pierre,

la vie est apparue à l’aube de Pâques,

jour de fête et de joie.

Exultons depuis la nuée :

Christ, tu es monté aux cieux,

inonde-nous de ta lumière.

 

L’amour est redonné

à la fraction du pain,

l’avenir est dans nos mains

pour la vie du monde.

Béni soit le Premier-né

qui endosse notre passé :

Christ, tu es assis à la droite du Père :

envoie sur nous la force de ton Esprit.

 

Allons sur les chemins, à la lumière du vivant

qui a vaincu la mort

et libéré nos corps.

Que nos cœurs s’unissent

dans ce printemps glorieux :

Christ, tu es toujours avec nous,

aide-nous à demeurer dans ton amour[9].

[Jacques Gauthier, théologien et poète Canadien]

 

Prière des fidèles

* Jésus notre frère, tu as fait route vers le ciel, vers celui qui est ton Père et aussi notre Père. Et, avant d’être « élevé » au ciel par le Père, tu nous as donné une mission à accomplir : « vous serez témoins de moi… jusqu’aux extrémités de la terre ». Celle-ci est une tâche immense pour nous, nous qui sommes des femmes et des hommes faibles, très faibles. Mais nous voulons quand même nous engager à vivre comme tes témoins. Soutiens-nous, donc, avec le « Souffle saint », le Souffle que tu nous as promis.

* Seigneur Dieu, dans le psaume nous t’avons chanté comme « le roi grand sur toute la terre ». Tu es donc le seul Seigneur qui « règne sur les nations ». Et le poète du psaume nous invitait : « Vous, tous les peuples, battez vos mains en applaudissant, dans vos cris de joie, poussez l’acclamation pour Dieu ». Quant à nous, nous voulons accueillir cette invitation. Mais aide-nous afin que cette acclamation soit faite… dans notre vie de tous les jours, dans un comportement fidèle à ta volonté, un comportement fruit « du plus profond respect » de ta royauté et de ton amour.

* Seigneur Dieu, la lettre aux Éphésiens nous encourage. Même si parfois nous avons l’impression que ton Fils unique – désormais assis à ta droite dans les cieux – soit loin de nous, la lecture de ce matin insiste : « le Christ est totalement présent », le Christ « remplit totalement chaque membre de l’Église ». Aide-nous, Seigneur, à découvrir – de jour en jour – cette présence, une présence toujours encourageante.

* Jésus notre frère, ton « pouvoir », mentionné dans l’Évangile, est totalement différent de tous les pouvoirs que le monde connaît. C’est un pouvoir qui donne la vie, c’est le pouvoir qui prend soin des personnes marginalisées, c’est le pouvoir d’aimer et de pardonner. Qu’au moins ton Église et la communauté que nous sommes ici ne connaissent pas d’autres pouvoir. C’est ainsi que, soutenus par ta présence, nous pourrons avoir part à ton ascension au ciel.

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[1] J.-L. Vesco, Le psautier de David traduit et commenté, Cerf, Paris, 2006, p. 432.

[2] D’après le texte hébreu, le poète pourrait aussi inviter les dieux de toute la terre à chanter Yahvéh. Dans cette ligne, on pourrait traduire ainsi les versets 7-8 :

7 Chantez, dieux, chantez pour notre Roi, chantez

8 qu’il est Roi de toute la terre, dieux, chantez pour le faire savoir.

Pour cette interprétation du texte hébreu, cf. D. Barthélemy, Critique textuelle de l’Ancien Testament. Tome 4. Psaumes, Academic Press – Vandenhoeck & Ruprecht, Fribourg – Göttingen, 2005, p. 277s.

[3] Pour cette traduction du mot hébreu « maskil », cf. J.-L. Vesco, Le psautier de David traduit et commenté, Cerf, Paris, 2006, p. 433.

 

[4] Cf. A. Dettwiler, Épître aux Éphésiens, dans Le Nouveau Testament commenté, sous la direction de C. Focant et D. Marguerat, Bayard – Labor et fides, Paris – Genève, 2012, p. 846s.

[5] C’est la tournure employée dans la Bible TOB pour traduire la préposition grecque « en » dans le verset 18.

[6] Cf. C. Reynier, L’épître aux Éphésiens, Cerf, Paris, 2004, p. 41.

[7] Pour cette traduction des derniers mots du v. 23, cf. C. Reynier, L’épître aux Éphésiens, Cerf, Paris, 2004, p. 77.

[8] Ces mots du verset 20 relient la finale de l’Évangile à la première page du même livre, et plus précisément à Mt 1,21-23. Cf. S. Grasso, Il Vangelo di Matteo: commento esegetico e teologico, Città Nuova, Roma, 2014, p. 835.

[9] Le grand livre des prières. Textes choisis et présentés par C. Florence et la rédaction de Prier, avec la collaboration de M. Siemek, Prier – Desclée de Brouwer, Paris 2010, p. 292s.