Eucharistie: 1 décembre 2024
1er Dimanche de l’Avent — Année C
Attendre ta venue et nous engager dans l’amour
Première lecture
Dans un instant, nous allons lire trois versets du livre de Jérémie, seulement trois versets mais d’une richesse et d’une actualité extraordinaires.
Ce petit texte du prophète a vu le jour pendant les années 588-587, lorsque la ville de Jérusalem était assiégée par les Babyloniens qui vont la détruire quelque mois plus tard. Dans cette situation tragique, Jérémie ose annoncer que Dieu va intervenir. Dieu va accomplir « la parole, la bonne parole » qu’il avait dite à la communauté d’Israël et à la communauté de Juda.
La parole que Dieu va accomplir apparaît comme une merveille, une surprise[1] : c’est comme une vie nouvelle après la saison sèche. Voilà pourquoi le texte utilise le verbe ‘germer’ et le mot ‘germe’. En effet, Dieu fera « germer pour David un germe de justice » (v. 15), un descendant qui va s’engager pour toute la communauté, pour tout le pays. C’est ainsi que, grâce à son travail, grâce à son engagement pour le droit, il y aura « la justice dans le pays » (v. 15) « et Jérusalem demeurera en sécurité » (v. 16). Encore plus surprenante est la finale de notre texte. Jérusalem recevra un nom nouveau, elle sera appelée « Yahvéh, c’est lui notre justice ». La population de Jérusalem, au cœur du pays, deviendra un témoignage vivant de l’intervention de Dieu, de Dieu qui est fidèle et cohérent par rapport à sa promesse[2].
Voilà l’avenir pour Jérusalem. Voilà quel doit être aussi l’avenir de notre communauté : nous devons être un témoignage vivant de la justice de Dieu, de la vie nouvelle que Dieu va faire germer.
Lecture du livre du prophète Jérémie (33,14-16)
14 Voici : des jours viennent – déclaration de Yahvéh – et j’accomplirai la parole, la bonne parole, que j’ai dite à la communauté d’Israël et à la communauté de Juda.
15 En ces jours-là, en ce temps-là, je ferai germer pour David un germe de justice et il agira selon le droit et la justice dans le pays.
16 En ces jours-là, le royaume de Juda sera sauvé et Jérusalem demeurera en sécurité. Et voici comment la ville sera appelée : « Yahvéh, c’est lui notre justice ».
Parole du Seigneur.
Psaume
Le psaume 25 est la prière des pauvres et des humbles : il s’agit des personnes qui, comme chacune et chacun de nous, reconnaissent leur faiblesse et leurs fautes, et demandent à Dieu de les guider sur le bon chemin.
De ce psaume, aujourd’hui nous allons lire trois strophes.
* Dans la première (vv. 4-5ab), le poète insiste sur l’idée du chemin. Il prie Dieu et lui dit : « Tes chemins, Yahvéh, fais-moi connaître, enseigne-moi tes sentiers ». Et dans le verset suivant, il revient sur l’idée du chemin en utilisant un verbe qui signifie « conduire sur le chemin ». A travers ces mots, Dieu est invité à lui « enseigner » le bon chemin, à le suivre et l’accompagner sur ce chemin, le chemin qui conduit au salut. Et ce salut, nous dit la finale de la strophe, est Dieu lui-même, le Dieu qui sauve, littéralement « le Dieu de mon salut ».
* La deuxième strophe (vv. 8-9) revient sur l’idée du chemin, le chemin de Dieu, « son chemin ». Oui, Dieu qui est « bon et juste », Dieu conduit sur le bon chemin, le chemin « vers le droit » ou, littéralement « dans le droit ». Mais dans cette strophe, le poète insiste aussi sur les destinataires que Dieu accompagne et auxquels il enseigne. Il s’agit des « humbles », un mot qui revient deux fois dans le même verset. Et ces humbles ne sont pas des saints, ils sont des « errants » (v. 8), des pécheurs, des « hatta’im » nous dit le texte hébreu, des personnes qui ont failli leur vie.
* La troisième strophe (vv. 10 et 14) revient encore sur les chemins de Dieu : « Tous les sentiers de Yahvéh sont amour et vérité ». Voilà ce que Dieu révèle à « ceux qui suivent (les règles de) son alliance et ses témoignages ». Et l’insistance sur l’alliance[3] revient aussi dans le dernier verset de cette strophe. C’est l’alliance que Dieu fait connaître « à ceux qui le respectent profondément ». Mais ce même verset évoque aussi l’intimité de Dieu, son « sôd », littéralement son « secret ». Si nous décidons de respecter profondément le Seigneur, « son secret, Yahvéh le confie » aussi à nous.
C’est avec cette attitude de confiance que nous, en utilisant les premiers mots de ce psaume, nous pouvons dire au Seigneur :
Vers toi, Seigneur, j’élève mon âme,
vers toi, mon Dieu.
Ces mots seront notre refrain à la fin de chaque strophe.
Psaume 25 (versets 4-5ab. 8-9. 10.14)
4 Tes chemins, Yahvéh, fais-moi connaître,
enseigne-moi tes sentiers.
5ab Conduis-moi sur le chemin de ta vérité
et enseigne-moi, car toi, tu es le Dieu qui me sauve.
Refr. : Vers toi, Seigneur, j’élève mon âme,
vers toi, mon Dieu.
8 Bon et juste est Yahvéh,
c’est pourquoi il montre aux errants le chemin.
9 Les humbles, il les conduit dans le chemin vers le droit
et il enseigne aux humbles son chemin.
Refr. : Vers toi, Seigneur, j’élève mon âme,
vers toi, mon Dieu.
10 Tous les sentiers de Yahvéh sont amour et vérité
pour ceux qui suivent (les règles de) son alliance et ses témoignages.
14 Son secret, Yahvéh le confie à ceux qui le respectent profondément,
il leur fait connaître son alliance.
Refr. : Vers toi, Seigneur, j’élève mon âme,
vers toi, mon Dieu.
Deuxième lecture
La première lettre aux Thessaloniciens est le premier écrit chrétien. La lettre a été composée par Paul, avec ses collaborateurs, vers l’an 50-51 du premier siècle.
Dans la petite section que nous allons écouter dans un instant, Paul exprime sa nostalgie des Thessaloniciens qu’il espère pouvoir rencontrer dès que possible (v. 11). Ensuite, après ce souhait rapide, la prière vise les chrétiens de Thessalonique. Pour eux, Paul demande à Dieu l’amour : l’amour réciproque et aussi l’amour envers les autres. D’abord l’amour réciproque à l’intérieur de la communauté où se rencontrent des personnes d’origine et de milieux divers ; ensuite l’amour pour le milieu environnant, un milieu païen qui, fréquemment, a de la peine à comprendre et à accepter les chrétiens[4]. En s’engageant dans l’amour dans ces deux directions, les chrétiens découvriront que l’amour est, en même temps, un don de Dieu, un Dieu qui les rend « irréprochables… en vue de la venue de notre Seigneur Jésus » (v. 13).
Bref : le fait de s’engager – et de nous engager – dans l’amour à l’intérieur de la communauté et envers les autres, nous permet de regarder au retour de Jésus à la fin des temps avec une attitude positive, sans aucune crainte. Et, en vue de ce retour, Paul invite les Thessaloniciens – et nous en même temps – à progresser sur le chemin qu’on a déjà commencé[5]. L’exhortation de l’apôtre est claire : « faites donc encore de nouveaux progrès » (v. 1).
De la Première lettre de saint Paul apôtre aux Thessaloniciens (3,11-4,2)
Frères, 311 que Dieu lui-même, notre Père, et que Jésus notre Seigneur guident notre chemin vers vous. 12 Quant à vous, que le Seigneur vous fasse grandir et abonder dans l’amour les uns envers les autres et envers tous, à l’image de notre amour pour vous. 13 Qu’il fortifie ainsi vos cœurs en les rendant irréprochables dans la sainteté devant Dieu notre Père, en vue de la venue de notre Seigneur Jésus avec tous ses saints. Amen.
41 Enfin, frères, nous vous demandons et vous encourageons dans le Seigneur Jésus : vous avez appris de nous comment vous devez vous conduire pour plaire à Dieu, et c’est ainsi que vous vous conduisez ; faites donc encore de nouveaux progrès. 2 En effet, vous savez quelles instructions nous vous avons données de la part du Seigneur Jésus.
Parole du Seigneur.
Alléluia. Alléluia.
Fais-nous voir, Seigneur, ton amour,
et donne-nous ton salut. (Psaume 84,8)
Alléluia.
Évangile
La nouvelle année liturgique, qui commence ce matin, nous propose la lecture de l’Évangile de Luc. Et, pour ce premier dimanche de l’avent, nous avons une page avec deux petites sections du dernier discours de Jésus (Lc 21,5-36). En effet, Jésus, après avoir annoncé la ruine du temple de Jérusalem, annonce la fin des temps et son retour dans la gloire.
Dans la première section qu’on va écouter (vv. 25-28), Jésus évoque la fin des temps comme un changement radical qui concerne la terre habitée, les cieux et ses puissances (v. 26). C’est la création tout entière à être puissamment secouée[6].
Dans ce cadre surprenant, l’Évangile présente la seconde venue de Jésus. Si la première, de la crèche à la croix, était marquée par la faiblesse et la souffrance, la seconde venue sera marquée par la puissance et la gloire[7].
L’annonce de cette deuxième venue se termine avec un encouragement adressé aux croyants : si des personnes sont anéanties par la peur des événements (v. 26), les croyants sont invités à se redresser, à retrouver le courage, à réveiller l’espoir, « car votre délivrance approche » (v. 28).
Quant à la deuxième section (vv. 34-36), elle indique comment vivre, tout en ignorant quand le Ressuscité reviendra. La réponse est simple : la vigilance et la prière « à chaque instant » (v. 36). C’est ainsi que nous pourrons « échapper à tous ces événements à venir » et nous « présenter debout devant le Fils de l’homme ».
Une dernière remarque. Dans l’histoire des deux derniers millénaires, à chaque génération, les catastrophes et les guerres ont été interprétées comme des signes de la fin des temps. Mais Jésus n’est pas un prophète de malheur. L’Évangile donne une clé pour lire l’histoire des hommes. Au-delà des peurs et des angoisses, il y a la promesse d’un monde nouveau, délivré de ses malheurs et transformé par Dieu[8].
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (21,25-28. 34-36)
« 25 Et il y aura des signes dans le soleil, et dans la lune et dans les étoiles. Et sur la terre, il y aura une angoisse des nations qui ne sauront que faire par le bruit violent de la mer et des vagues.
26 Des gens vont mourir par la peur et l’attente des événements qui vont arriver sur la terre habitée. En effet, les puissances des cieux seront ébranlées. 27 Et alors, ils verront le Fils de l’homme arriver dans un nuage, avec beaucoup de puissance et de gloire. 28 Quand ces événements commenceront à se produire, redressez-vous et relevez votre tête, car votre délivrance approche.
34 Prenez garde à vous-mêmes ! Ne laissez pas vos cœurs s’alourdir dans les excès, les ivresses et les soucis de cette vie, et que ce jour-là n’arrive sur vous à l’improviste, 35 comme un piège ; car il viendra sur tous ceux qui vivent sur la face de la terre entière. 36 Veillez donc priant à chaque instant. Alors, vous aurez la force d’échapper à tous ces événements à venir et de vous présenter debout devant le Fils de l’homme.
Acclamons la Parole de Dieu.
Prière d’entrée
Père, oublie nos errements,
souviens-toi seulement de ton amour sans fin,
conserve-nous dans ta vérité :
éclairé(e)s par elle à chaque instant,
nous pouvons suivre le chemin de la vie,
le chemin sur lequel ton Fils Jésus nous précède. Amen[9].
[David Maria Turoldo, prêtre et poète, Italie : 1916-1992]
Prière des fidèles
* Le livre de Jérémie contient un message exceptionnel. Aux habitants assiégés par les Babyloniens, Dieu annonce un avenir inimaginable : grâce à celui qui sera « un germe de justice », Jérusalem deviendra une ville dans laquelle la justice de Dieu se réalisera concrètement. Que notre communauté puisse, d’une certaine façon, devenir un peu semblable à la ville évoquée par le prophète.
* Le poète du psaume nous rappelle que nous sommes faibles, nous sommes des « errants ». Mais le poète nous rappelle aussi que le Seigneur est « bon et juste, c’est pourquoi il montre aux errants le chemin ». Ouvrons donc nos cœurs pour accueillir son enseignement, pour découvrir l’alliance qu’il a faite avec nous. Et il nous confiera « son secret », son intimité.
* Paul invitait les chrétiens de Thessalonique, et invite nous aussi, à laisser tomber la peur devant le retour du Christ et, en même temps, à nous engager dans l’amour, l’amour entre croyants et aussi l’amour « envers tous ». Aide-nous, Seigneur, à faire « encore de nouveaux progrès », des actions concrètes dans cette direction.
* L’Évangile nous demande de ne pas perdre la tête dans les excès et les ivresses. D’autre part, même « les soucis de cette vie » ne doivent pas nous faire oublier que l’histoire de l’humanité et notre histoire personnelle sont ouvertes à une rencontre. Aide-nous à prendre conscience que notre délivrance approche et qu’elle nous permettra, comme Jésus nous l’a dit, de nous présenter « debout devant le Fils de l’homme ».
[1] Cf. S. Amsler, Germogliare, dans E. Jenni – C. Westermann (a cura di), Dizionario Teologico dell’Antico Testamento. Volume II, Marietti, Casale Monferrato, 1982, col. 508s.
[2] Cf. G. Fischer, Jeremia 26-52, Herder, Freiburg – Basel – Wien, 2005, p. 234.
[3] Cf. G. Ravasi, Il libro dei Salmi. Commento e attualizzazione. Vol. I (Salmi 1-50), EDB, Bologna, 2015, p. 469.
[4] Cf. S. Légasse, Les Épîtres de Paul aux Thessaloniciens, Cerf, Paris, 1999, p. 194.
[5] Cf. G. Barbaglio, Le lettere di Paolo. Traduzione e commento. Volume 1, Borla, Roma, 1980, p. 124.
[6] Cf. F. Bovon, L’Évangile selon saint Luc. Vol. IIId : 19,28 – 24,53, Labor et Fides, Genève, 2009, p. 153s.
[7] Cf. Ibid., p. 155.
[8] ZeBible : l’autre expérience. Ancien et Nouveau Testament : avec les livres deutérocanoniques / trad. de l’hébreu et du grec en français courant ; avec introductions, notices, outils de lecture et vocabulaire, Bibli’O Éditeur, Villiers-le-Bel, 2011, p. 1817.
[9] D. M. Turoldo – G. Ravasi, « Lungo i fiumi… ». I salmi. Traduzione poetica e commento, San Paolo, Cinisello Balsamo (Milano), 1987, p. 85.