Eucharistie: 30 novembre 2025
1er dimanche de l’Avent — Année A
Le Fils de l’homme va retourner : soyons préparé(e)s
Première lecture
La page que nous allons écouter dans un instant nous livre la parole qu’Isaïe a pu contempler : ce qui adviendra dans « l’après des jours » (v. 2). Cette expression évoque un avenir pas si proche ; en effet, actuellement, nous dit Isaïe, la ville est « devenue une prostituée, refuge des assassins, et ses chefs sont des rebelles, complices des voleurs » (Is 1,21-23).
Mais, dans « l’après des jours », il y aura un changement profond : la situation de Jérusalem et de la montagne de Yahvéh sera changée par Dieu lui-même. Elle sera meilleure par rapport à celle des autres peuples, comme une montagne au milieu des collines (v. 2) ; elle sera solide et consolidée par la justice (54,14). Et les nations se mettront en marche vers elle. Mais, nous dit la partie centrale du verset 3, l’intérêt des peuples n’est pas la ville en tant que telle ; c’est Yahvéh lui-même : « Il nous enseignera ses chemins » et nous voulons aller sur « les sentiers qu’il nous montre ».
Les conséquences de cette marche des peuples sont surprenantes : l’instruction donnée par Dieu permet de résoudre les conflits entre les peuples. En plus… le désarmement : transformer les armes – des instruments de mort – en instruments au service de la vie, pour nourrir et non pour tuer. Enfin, au lieu de « apprendre la guerre » pour assurer ses propres intérêts, on va apprendre la paix.
Après cette description de la parole contemplée par le prophète, c’est le prophète lui-même qui invite son peuple : « Allez, maison de Jacob » (v. 5). Avec le même impératif qui a introduit la marche des peuples (v. 3), Isaïe invite son peuple à marcher « dans la lumière » que Dieu vient de donner.
Et cette invitation n’est pas adressée seulement aux contemporains du prophète. Elle vaut aussi pour nous aujourd’hui[1].
Lecture du livre d’Isaïe (2,1- 5)
1 C’est la parole qu’a contemplée Isaïe, fils d’Amoç,
à propos du royaume de Juda et de la ville de Jérusalem.
2 Et adviendra dans l’après des jours :
la montagne de la maison de Yahvéh sera établie sur le sommet des montagnes.
Elle s’élèvera au-dessus des collines,
et toutes les nations viendront vers elle.
3 Et beaucoup de peuples se mettront en route. Ils diront :
« Allez, nous allons monter vers la montagne de Yahvéh,
vers la maison du Dieu de Jacob.
Il nous enseignera ses chemins :
et nous suivrons les sentiers qu’il nous montre ».
En effet, c’est de Sion que vient l’instruction,
et de Jérusalem la parole de Yahvéh.
4 Il rendra son jugement entre les nations,
il sera un arbitre pour des peuples nombreux.
Avec leurs épées, ils fabriqueront des socs de charrue,
avec leurs lances, ils feront des faucilles.
Et une nation ne lèvera plus l’épée contre une nation,
et ils n’apprendront plus la guerre.
5 Allez, maison de Jacob,
et nous irons dans la lumière de Yahvéh.
Parole du Seigneur.
Psaume
Comme nous l’avons déjà vu il y a une semaine, le psaume 122 est un chant de pèlerinage vers Jérusalem et vers son temple.
Comme chez l’auteur du psaume, la première strophe (vv. 1-2) suscite en nous la joie, la joie d’ « aller à la maison de Yahvéh ». Et ici le verbe « aller » caractérise notre condition humaine. En effet, nous faisons l’expérience de Dieu comme loin de nous, mais nous avons aussi la possibilité d’aller chez lui et de le rencontrer[2], dans sa maison, la maison dans laquelle on peut faire une expérience particulière de sa présence.
La deuxième et la troisième strophe (vv. 3-5) nous présentent la ville de Jérusalem. Et Jérusalem est un peu l’image de la ville vers laquelle nous sommes en marche, une ville solide, un point de rencontre, là où les personnes, chacune dans sa propre identité, se rencontrent et s’accueillent. Et dans la ville chantée dans le psaume, les personnes se rencontrent aussi avec Dieu, pour le louer. Et cette louange à Dieu naît du fait que Dieu veut une humanité comme un lieu où la justice de Dieu, non la nôtre, triomphe[3].
Les deux dernières strophes (6-7 et 8-9) sont un chant pour la paix. Cette paix est présentée comme une succession d’ondes : elles atteignent d’abord la ville, puis ses murs, enfin aussi les palais[4]. Il s’agit donc d’un mouvement qui, depuis loin, arrive jusque dans l’intimité de la ville, même dans les palais les plus enfermés sur eux-mêmes. Et les deux derniers versets nous montrent le poète qui s’engage, personnellement, pour la paix. Il s’engage pour l’amour de ses frères et de ses amis, mais il s’engage aussi parce qu’il aime Dieu, Dieu qui est présent dans son temple[5].
Une dernière remarque. Dans ce psaume – composé en hébreu seulement de 62 mots – les mots Jérusalem, paix et maison reviennent, chacun trois fois. Même le mot Yahvéh revient trois fois et, à ce mot plein de respect, s’ajoute, une fois, la forme plus intime, Yah. C’est à lui qu’appartiennent les tribus (v. 4), et lui, il est « notre Elohim » (v. 9), notre Dieu. Et cette relation fondamentale avec celui qui est notre Dieu doit nous engager pour la paix. Voilà quelle doit être la conséquence du fait que nous allons dans la maison du Seigneur. C’est avec cette conviction que nous pouvons intervenir, à la fin de chaque strophe, avec ce refrain qui reprend le verset 1 :
Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
Psaume 122 (versets 1-2. 3-4ab. 4cd-5. 6-7. 8-9)
1bc Quelle joie, quand on m’a dit :
« Nous voulons aller à la maison de Yahvéh ! »
2 Et maintenant nos pieds
se tiennent à tes portes, Jérusalem !
Refr. : Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
3 Jérusalem, quelle ville bien construite,
quel ensemble : tout est associé pour elle !
4ab C’est là que les tribus – les tribus de Yah –
montent en pèlerinage.
Refr. : Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
4cd Elles viennent célébrer le nom de Yahvéh,
selon la règle en Israël.
5 Car là sont placés des trônes pour la justice,
des trônes pour la maison de David.
Refr. : Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
6 Demandez la paix pour Jérusalem !
« Qu’ils vivent en tranquillité, ceux qui t’aiment !
7 Que la paix règne dans tes murs
et la tranquillité dans tes palais ! »
Refr. : Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
8 Pour l’amour de mes frères et de mes amis,
je dirai : « La paix soit chez toi ! ».
9 Pour l’amour de la maison de Yahvéh notre Elohim,
je veux rechercher le bien pour toi.
Refr. : Dans la joie, nous irons à la maison du Seigneur.
Deuxième lecture
Vers les années 57 ou 58, Paul écrit à la communauté de Rome, une communauté qui – à ce moment là – a une quinzaine d’années d’existence. Elle est constituée de chrétiens d’origine juive et d’autres d’origine païenne, et des tensions existent entre ces deux groupes. Paul est préoccupé de ce conflit[6] et, en préparant son voyage pour visiter cette communauté, il insiste sur l’amour : en effet tous les commandements « se résument dans cette parole : Tu aimeras ton prochain » (v. 9).
A l’amour, qui est la caractéristique fondamentale du chrétien, Paul ajoute un autre aspect, celui qu’on lira dans un instant : c’est l’attitude devant le présent et l’avenir. Il faut vivre le présent en sachant que, dans le présent, on prépare l’avenir, l’avenir définitif : le salut à la fin des temps.
Cet avenir, comme nous dira l’Evangile, n’est connu par personne. Mais on peut en parler à travers des images, celle de la nuit et celle du jour. L’avenir c’est le jour, la lumière. Le présent c’est la fin de la nuit : « La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche » (v. 12). Voilà pourquoi il faut s’éveiller du sommeil, il faut assumer ses responsabilités et la maîtrise de soi[7] ; il faut aussi abandonner et rejeter « les œuvres des ténèbres » (v. 12), donc tout ce qui s’oppose à l’amour. En effet, continuer à dormir serait perdre le jour[8], le jour définitif, qui est tout proche.
Et, en terminant sa page, Paul indique les mauvais comportements à éviter : les excès dans la nourriture et les boissons, un comportement immoral au niveau de la sexualité et de notre vie en société. Au fond, le comportement du chrétien doit être semblable à celui que Jésus lui-même a vécu. A ce propos, Paul utilise une image, celle du croyant qui doit « se revêtir » du Seigneur Jésus Christ. Et à travers cette image, Paul demande – à chacune et chacun de nous – de nous unir au Christ. Et c’est une unité qui nous transforme intimement et nous fait vivre conformément au projet de Dieu[9].
De la lettre de saint Paul apôtre aux Romains (13,11-14a)
11 Vous connaissez le temps où nous sommes : c’est le moment de vous éveiller de votre sommeil ; car maintenant le salut est plus proche de nous que lorsque nous sommes venus à la foi.
12 La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche, définitivement ! Rejetons donc les œuvres des ténèbres et revêtons les armes de la lumière. 13 Conduisons-nous honnêtement, comme il convient à la lumière du jour : évitons de trop manger ou de trop boire. N’ayons pas une vie immorale ou dérèglée, évitons les disputes et les jalousies.
14a Revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ.
Parole du Seigneur.
Alléluia. Alléluia.
Fais-nous voir, Seigneur, ton amour,
et donne-nous ton salut. (Psaume 84,8)
Alléluia.
Évangile
L’Évangile de Matthieu est structuré sur cinq discours : celui de la montagne avec les béatitudes (Mt 5-7), le discours missionnaire (Mt 10), les paraboles du royaume (Mt 13), le discours sur la communauté des croyants (Mt 18) et celui de la fin des temps (Mt 23-25). De ce dernier discours, ce matin, nous allons en écouter une section.
Ici, Jésus parle du jour et de l’heure dans laquelle le Fils de l’homme viendra. Ce fut le prophète Daniel, deux siècles avant Jésus, à annoncer : « Voici venir, avec les nuées du ciel, comme un Fils d’homme. Et il lui fut donné souveraineté, gloire et royauté, et les gens de tous peuples, nations et langues le servaient » (Dan 7,13s).
Quant à Jésus, il avoue que le moment de cette venue n’est connu par personne « sinon le Père, et lui seul » (v. 36). D’autre part, ni les désastres annoncés ni les catastrophes qui surviennent dans l’histoire ne renseignent pas les croyants sur le moment de cette venue. Guetter les signes ne sert à rien. Celui qui met sa confiance en Jésus doit se tenir prêt à accueillir sa venue à tout moment[10]. D’ici l’impératif : « veillez donc » (v. 42). Soyez conscient(e)s du fait que l’histoire de l’humanité est ouverte à un avenir que nul ne connaît. Oublier, dans la vie quotidienne, cette ouverture serait se comporter comme la génération de Noé : ces gens-là « ne se sont rendu compte de rien jusqu’à ce que vînt le déluge, qui les emporta tous » (v. 39).
L’autre image utilisée par Jésus est celle des deux hommes, ou des deux femmes, qui travaillent côte à côte. Jésus ne pense pas à une séparation entre un peuple bon et un peuple méchant. Au contraire, la venue du Fils de l’homme va séparer ceux-là même qui vivaient côte à côte, deux hommes ou deux femmes qui font le même travail, mais avec deux attitudes différentes[11]. L’attitude de celui ou de celle qui veille, et l’attitude de celui ou de celle qui a la tête ailleurs. Voilà le choix. Un choix aussi pour nous.
De l’Evangile de Matthieu (24,36-44)
Jésus disait à ses disciples : 36 « A propos de la fin, ce jour et cette heure, nul ne les connaît, ni les anges des cieux, ni le Fils, personne sinon le Père, et lui seul.
37 Tels furent les jours de Noé, telle sera la venue du Fils de l’homme. 38 En effet, dans les jours qui ont précédés le déluge, les gens mangeaient, buvaient, ils se mariaient ou donnaient leurs filles en mariage. Et cela jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche : 39 les gens ne se sont rendu compte de rien jusqu’à ce que vînt le déluge, qui les emporta tous. Tel sera aussi la venue du Fils de l’homme. 40 Alors deux hommes seront dans leur champ : l’un est pris, l’autre laissé. 41 Deux femmes en train de moudre à la meule : l’une est prise, l’autre laissée.
42 Veillez donc, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient. 43 Comprenez bien ceci : si le maître de maison connaissait à quelle heure de la nuit le voleur vient, il veillerait et ne laisserait pas percer le mur de sa maison. 44 C’est pourquoi, vous aussi, soyez prêts. En effet, le Fils de l’homme vient à l’heure que vous ne pensez pas ».
Acclamons la Parole de Dieu.
Prière d’ouverture
O Dieu, Père plein de tendresse,
pour réunir les peuples dans ton Royaume,
tu as envoyé ton Fils unique,
maître de vérité et source de réconciliation.
Réveille en nous, nous te prions,
une attitude vigilante :
c’est ainsi que nous pourrons parcourir tes chemins de liberté et d’amour
jusqu’à te contempler dans ta gloire éternelle.
Nous te le demandons par Jésus qui est notre frère et Seigneur.
Amen.
Prière des fidèles
* Seigneur, aide-nous à mettre en pratique le message du prophète Isaïe : la décision d’utiliser nos épées pour fabriquer des socs de charrue, et nos machettes pour en faire des faucilles. C’est ainsi que nous suivrons, Seigneur notre Dieu, les sentiers que tu nous montres. C’est seulement ainsi que nos quartiers seront des quartiers de paix.
* Le psaume nous a invité(e)s à demander tranquillité et paix : « Qu’ils vivent en tranquillité, ceux qui t’aiment ! Que la paix règne dans tes murs ! ». Mais, pour que notre prière pour la paix soit une vraie prière, il faut que nous aussi nous nous engagions. D’ici l’exhortation finale du psaume : « Pour l’amour de mes frères et de mes amis, je dirai : La paix soit chez toi ! Pour l’amour de la maison de Yahvéh notre Elohim, je veux rechercher le bien pour toi ». Donne-nous, Seigneur, la force de nous comporter ainsi.
* La lettre de Paul nous demande de revêtir « les armes de la lumière ». Et ces armes sont, tout simplement, une conduite honnête. L’apôtre nous le dit très clairement : « N’ayons pas une vie immorale ou dérèglée, évitons les disputes et les jalousies ». C’est ainsi que nous pouvons « nous revêtir » du Seigneur Jésus Christ et nous préparer à son retour à la fin des temps.
* Dans l’Évangile, Jésus évoque le temps de Noé, lorsque « les gens mangeaient, buvaient, ils se mariaient ou donnaient leurs filles en mariage ». Ces gens vivaient normalement, sans se rendre compte que le déluge approchait. Quant à nous, ce qui nous attend ce n’est pas le déluge mais… le retour de Jésus. Et devant sa venue, nous sommes impuissants. Nous ne pouvons que prier : « Que ton règne vienne ! » et vivre en étant prêts. C’est lui-même qui nous le dit : « vous aussi, soyez prêts ». Donne-nous la force, Seigneur, de vivre ainsi.
[1] Cf. W. A. M. Beuken, Jesaja 1-12, Herder, Freiburg – Basel – Wien, 2003, p. 96.
[2] Cf. E. Zenger, Psalm 122, dans F.-L. Hossfeld – E. Zenger, Psalmen 101-150, Herder, Freiburg – Basel – Wien, 2008, p. 457.
[3] Cf. C. M. Martini, Il desiderio di Dio. Pregare i salmi, Centro ambrosiano, Milano, 2002, p. 130.
[4] Cf. G. Ravasi, Il libro dei salmi. Commento e attualizzazione. Vol. III (Salmi 101-150), EDB, Bologna, 2015, p. 546.
[5] Cf. E. Zenger, Psalm 122, dans F.-L. Hossfeld – E. Zenger, Psalmen 101-150, Herder, Freiburg – Basel – Wien, 2008, p. 463.
[6] Cf. ZeBible. L’autre expérience. Ancien et Nouveau Testament, Biblio’O, Villiers-le-Bel, 2011, p. 1923.
[7] Cf. S. Légasse, L’épître de Paul aux Romains, Cerf, Paris, 2002, p. 844s.
[8] Cf. H. Schlier, La lettera ai Romani, Paideia, Brescia, 1982, p. 637.
[9] Cf. S. Légasse, L’épître de Paul aux Romains, Cerf, Paris, 2002, p. 848.
[10] Cf. ZeBible. L’autre expérience. Ancien et Nouveau Testament, Biblio’O, Villiers-le-Bel, 2011, p. 1719.
[11] Cf. La Bible des peuples. La Bible présentée et commentée pour les communautés chrétiennes et pour ceux qui cherchent Dieu, par B. et L. Hurault et J. Van der Meersch, Le Sarment, Paris, 2002, note à Mt 24, p. 59.
